'Juste la fin du monde', de Xavier Dolan
Le 6e film de Xavier Dolan, récompensé par le Grand Prix du Festival de Cannes 2016, est enfin dans les salles! Voilà encore une belle leçon de cinéma, même si pour moi il ne surclasse pas 'Mommy'.
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Drame franco-canadien de 1h35min réalisé par Xavier Dolan avec Gaspard Ulliel, Nathalie Baye, Léa Seydoux, Marion Cotillard, Vincent Cassel. Sortie le 21 septembre 2016.
Synopsis: Après douze ans d’absence, un écrivain retourne dans son village natal pour annoncer à sa famille sa mort prochaine. Ce sont les retrouvailles avec le cercle familial où l’on se dit l’amour que l’on se porte à travers les éternelles querelles, et où l’on dit malgré nous les rancoeurs qui parlent au nom du doute et de la solitude (source allocine.fr).
Le saviez-vous?
Juste la fin du monde est l'adaptation d'une pièce théâtrale éponyme de Jean-Luc Lagarce. Disparu en 1995 à 38 ans seulement, il est aujourd'hui l'auteur le plus joué. Adapter au cinéma Lagarce, connu pour son travail précis des mots, était un vrai défi pour Xavier Dolan, qui a décidé de respecter l'oeuvre originale au maximum :"Je voulais que les mots de Lagarce soient dits tels qu’il les avait écrits. Sans compromis. C’est dans cette langue que repose son patrimoine, et c’est à travers elle que son œuvre a trouvé sa postérité. L’édulcorer aurait été banaliser Lagarce", explique le réalisateur.
La pièce de Lagarce a été recommandée à Xavier Dolan par Anne Dorval, qui l'avait jouée sur scène en 2001, peu de temps après le tournage de J'ai tué ma mère. Une recommandation qui s'est avérée un échec cuisant :"J’avais à l’égard de l’histoire et des personnages un blocage intellectuel qui m’empêchait d’aimer la pièce tant vantée par mon amie. J’étais sans doute trop pris par l’impatience d’un projet ou l’élaboration de ma prochaine coiffure pour ressentir la profondeur de cette première lecture diagonale", se remémore le cinéaste. C'est finalement après le tournage de Mommy que Dolan s'est de nouveau intéressé à l'ouvrage : "Tôt cet été-là, je relus - ou lus, vraiment - Juste la fin du monde. Je sus vers la page 6 qu’il s’agirait de mon prochain film. Mon premier en tant qu’homme."
Source: allocine.fr
Mon avis:
Si certaines personnes semblent avoir très touchées par Juste la fin du monde (voir l'article de madmoizelle.com), personnellement il ne m'a pas laissée sous le choc comme Mommy ou Laurence anyways (à voir absolument si ce n'est pas déjà fait!), qu'il m'avait fallu plus de temps pour "digérer"... Mais Xavier Dolan avait mis la barre tellement haut avec ses précédents films!
Juste la fin du monde n'en reste pas moins un film remarquable, un huis-clos oppressant quasiment toujours filmé en (très) gros plan. On entend beaucoup parler du casting, il est vrai tout à fait convaincant même si Gaspard Ulliel, Léa Seydoux et Marion Cotillard ne font pas partie de mes acteurs préférés. Le personnage qui m'a le plus touchée, en-dehors de Louis (l'écrivain) qui occupe une place particulière, est celui de la mère de famille interprétée par une Nathalie Baye maquillée comme un camion volé. Cette femme qui peut devenir hystérique est en même temps très lucide, comme en témoigne la scène où elle s'isole avec Louis. Mais seule Catherine, sa belle-soeur jouée par Marion Cotillard, essaie de le mettre à l'aise au lieu de l'accabler de reproches. Paradoxalement c'est la "pièce rapportée" du groupe qui semble la plus à même de le comprendre...et de deviner la raison de sa venue.
Le film illustre le fait qu'en famille, on est souvent prisonnier de l'image qu'on avait enfant, on ne se voit pas forcément évoluer les uns les autres. Il est parfois difficile d'accepter le changement, de constater qu'on n'a plus beaucoup de choses en commun mis à part les souvenirs. Pendant toute cette journée de retrouvailles, Louis de son côté est comme empêché, il a du mal à s'exprimer. Sa mère et ses frères et soeurs, s'il ne fait aucun doute qu'ils l'aiment (mais mal), ne peuvent s'empêcher de lui faire des reproches... Et comme toujours dans les films de Xavier Dolan, on remarquera que le père est absent.
Ce qui m'a le plus séduit dans Juste la fin du monde, ce sont les séquences musicales, autant de moments d'accalmie au milieu des cris et des disputes. Camille, O-Zone, Genesis et Moby habillent ces jolies transitions pendant lesquelles Louis se remémore son enfance ou se met à distance... Ces scènes, fortes, puissantes, font qu'il faut voir Juste la fin du monde sur grand écran. D'ailleurs il me semble que toute la filmographie de Xavier Dolan prend une autre dimension au cinéma. A l'heure où on "consomme" de plus en plus de vidéos sur petit écran (télé, ordinateur...), je tiens à remercier le réalisateur québécois de célébrer autant le 7e art, en créant à chaque nouveau film une vraie expérience à vivre dans les salles obscures.
Cerise sur le gâteau : Xavier Dolan est jeune (27 ans), multi-casquettes (réalisateur, acteur, scénariste, producteur, monteur, décorateur, costumier, coiffeur...), passionné (6 films en 7 ans) et pas du tout blasé, puisqu'il avait encore le sourire samedi soir, à l'issue de sa journée-marathon dans six cinémas de Toulouse! Le sourire et assez d'énergie pour répondre aux nombreuses questions d'un public totalement sous le charme (moi la première)... Il faut dire que le cinéaste est en train de réaliser un rêve d'adolescent en tournant son premier film américain. The Death and life of John F. Donovan réunira entre autres Kit Harington (la star de Game of Thrones), Jessica Chastain, Susan Sarandon ou encore Natalie Portman. Sortie prévue à l'automne prochain!